Thiollierea naounarum Fleurot & Barrabé, 2021

Barrabé, Laure & Fleurot, Dominique, 2021, Deux espèces nouvelles de Thiollierea Montrouz. (Rubiaceae), endémiques des massifs Nord-Ouest de la Grande Terre (Nouvelle-Calédonie), Adansonia (3) 43 (5), pp. 37-47 : 42-46

Thiollierea naounarum Fleurot & Barrabé , sp. nov.

( Figs 2 ; 4 ; 5 )

Thiollierea naounarum Fleurot & Barrabé , sp. nov. ressembles Thiollierea macrophylla (Brongn.) Baum-Bod. in having a smooth hypanthium without ornamentation, but differs from the latter species in having usually uniflorous (vs triflorous to pluriflorous) inflorescences, foliaceous (vs reduced and streamlined) bracts, zygomorphic (vs actinomorphic) flowers, warts on hypanthium (vs without warts) and in being microendemic from the North-Western Kopéto mountain (vs widely distributed in the Southern region).

TYPUS. — Nouvelle-Calédonie. Grande Terre, Kopéto, Pouembout , maquis paraforestier à Gymnostoma chamaecyparis , subtrat ultramafique, serpentines sur pente, quelques éboulis, 250 m, 21°11’52.9”S, 165°01’56.6”E, 7.VIII.2006, fl.fr, Barrabé 364 (Leg. Rigault & Barrière) (holo-, NOU [ NOU014202 ]!; iso-, NOU [ NOU054657 ]!, P [ P06714987 ]!, S!) .

MATÉRIEL ÉTUDIÉ. — Nouvelle-Calédonie. Grande Terre , Kopéto, maquis paraforestier à Gymnostoma chamaecyparis , substrat ultramafique, serpentines sur pente, quelques éboulis, ultramafique, 184 m, 21°11’52.241”S, 165°01’58.838”E, 11.XII.2018, bt., fr., Fleurot 505 ( NOU [ NOU089980 , NOU105589 ]!; K!; P!) . — Kopéto , Pouembout, maquis paraforestier à Gymnostoma chamaecypari s, substrat ultramafique, serpentines sur pente, quelques éboulis, 184 m, 21°11’52.241”S, 165°01’58.838”E, 11.XII.2018, fl., Fleurot & Porin-Pouéa 537 ( NOU [ NOU090220 , NOU105622 ]!; K!; P!) .

ÉTYMOLOGIE. — Cette espèce est dédiée au clan Naouna de la tribu de Ouaté sur la commune de Pouembout. Hervé Vandrot, botanistetaxonomiste à l’IAC-UMR AMAP, basé à IRD de Nouméa, ainsi que Dominique Fleurot ont souhaité rendre un hommage à ce clan pour son engagement dans des projets touchant à l’environnement comme la Classe Découverte de Ouaté. Le clan Naouna a aussi activement participé par l’accompagnement des scientifiques dans l’étude sur les forêts denses humides en Province Nord de la région de Forêt Plate située non loin de la tribu de Ouaté.

DISTRIBUTION ET ÉCOLOGIE. — Thiollierea naounarum Fleurot & Barrabé , sp. nov. est présente en maquis paraforestier à Gymnostoma chamaecyparys , sur pente serpentineuse présentant quelques éboulis, en amont de la piste d’accès d’une zone d’exploitation de nickel du massif du Kopéto. L’unique localité connue est restreinte à un talweg en bas de pente du massif, entre 160 et 250 m d’altitude, sur la commune de Pouembout.

Les récoltes de cette espèce sont actuellement encore trop peu nombreuses pour pouvoir conclure quant aux périodes de floraison et fructification. Toutefois, des spécimens en boutons, fleurs et fruits ont été observés aux mois d’août et décembre.

STATUT DE CONSERVATION. — Catégorie sur la Liste Rouge de l’UICN: En Danger Critique d’Extinction (CR; B1a, b; B2a, b; C2a(i)). B1: l’étendue totale de l’aire d’occurrence est inférieure à 4 km ²; a, l’unique population connue est confinée à la base du massif minier du Kopéto. B2: l’étendue totale de l’aire d’occupation est inférieure à 4 km ²; a, b(iii). C2a: La population est estimée à moins de 120 individus matures et un déclin continu est prévu. Kopéto est un massif minier actuellement exploité activement pour l’extraction de nickel par la SLN ( Fig. 2 ). Thiollierea naounarum Fleurot & Barrabé , sp. nov. n’est pas menacée directement par l’exploitation du minerai à ciel ouvert, car l’espèce pousse sur un sol serpentineux, non minéralisé. Ce secteur n’est pas accessible au public, car l’entrée est restreinte par la Société Le Nickel. Cependant des pans entiers de maquis minier ont brûlé ces dernières années sur les montagnes non loin de ce site. Le critère de classification UICN, pour cette espèce toutefois fragile, montre la nécessité de la mise en place d’un système de protection environnemental revu et approprié ( Jaffré et al. 1998). Des programmes de protection, de multiplication et de plantation de cette espèce devront être mis en oeuvre sur le massif même de Kopéto. Il faudra néanmoins apporter une vigilance accrue contre les départs de feux qui se produisent fréquemment dans la région et qui constituent la principale menace pour l’espèce.

DESCRIPTION

Arbuste très ramifié, pouvant atteindre 3,5 m de hauteur. Rameau glabre, à écorce coriace et craquelée longitudinalement et horizontalement, grise, parsemée de lenticelles sombres. Bourgeon végétatif terminal abondamment cireux. Stipules interpétiolaires, persistantes, tronquées, annulaires, soudées et engainantes, fripées horizontalement in sicco, à rebord supérieur arrondi de 3-4 × 1,7-2,5 mm, cireuses. Feuilles coriaces, brillantes, glabres, groupées à l’extrémité des rameaux; pétiole long de 1,8-3 cm, épais de 1,2-2 mm, à section basale plano-convexe, canaliculé sur la face adaxiale; limbe de 5-10,5 × 1,5-3,1 cm, oblancéolé, apex arrondi à aigu, base atténuée et finement décurrente, marge entière et finement révolutée. Nervation brochidrodrome; nervure médiane saillante à section circulaire sur la face abaxiale et caniculée sur la face adaxiale, 5-10 paires de nervures secondaires, espacées de 0,5-1,2 cm, formant un angle de 55-80° avec la nervure médiane, très peu visibles à finement saillantes sur la face adaxiale, noyées à très finement imprimées sur la face abaxiale, réseau tertiaire noyé à finement saillant sur la face adaxiale et noyé sur la face abaxiale.

Inflorescence axillaire 1-3 flore. Axes inflorescentiels glabres, présentant 2-4 noeuds et 2-4 entrenoeuds d’une longueur cumulée de 1,8-6,5 cm; pédoncule long de 0,7-3 cm, épais de 1,1-2 mm, aplati et finement ailé; 2 bractées foliacées par noeud, parfois caduques, oblancéolées à étroitement oblancéolées, 0,7-2,7 × 0,25-0,6 cm, à apex arrondi à aigu, et marges finement révolutées, avec la nervure médiane finement saillante sur les faces adaxiale et abaxiale; pédicelle long de 8-15 × 0,8- 1,2 mm, bractéoles parfois absentes, glabres, de 0,8-1 mm.

Fleurs pentamères, zygomorphes, retombantes. Préfloraison imbriquée, hypanthe de 8-13 × 5 mm, étroitement turbiné, lisse, parsemé de quelques verrues, sans aile, sans côte; calice glabre extérieurement, cireux et densément hirsute intérieurement; tube discret long de 0,6-0,8 mm, 4-5 lobes de 0,5-1,6 × 1,6-3 mm, à marges involutées soudées en gaines, linéaires, falqués, étalés perpendiculairement à la corolle, à apex aigu, à base large de 0,6-1,4 mm, à face interne éparsement tapissée d’environ 75-85 cérocystes granuleux, ronds, de 0,2 mm de diamètre. Corolle arquée, régulièrement évasée et infundibuliforme, rouge extérieurement à base jaunissante, intérieurement rouge avec une bande jaune centrale par lobe, coriace, extérieurement glabre, intérieurement glabre à l’exception d’une couronne hirsute de 3-4 mm de hauteur positionnée à 2-2,5 mm de la base de la corolle, et de lignes faiblement hirsutes sur 10-11 mm à la jointure des lobes; tube long de 5.5 cm, à gorge évasée large de 3 cm, à base étranglée large de 0,7 cm; lobes de 1,1 × 1,7 cm, triangulaires, récurvés, apiculés.Étamines semi-incluses, arquées; anthères glabres de 13,5-14 mm × 2 mm, largement torsadées; filets de 42-46 × 0,5-1,5 mm, à sections basale et apicale cylindriques, soudés par leurs bases sur une hauteur de 2 mm, présentant une pilosité basale, hirsute, oblique sur 4 mm et située au-dessus d’une partie glabre extérieure de 2 mm. Style de 63,5 mm × 0,5 mm, filiforme, à section cylindrique, terminé par 2 lobes stigmatiques bombés, accolés sur 1,2 mm, zone papilleuse réceptive restreinte aux stigmates. Ovaire biloculaire; disque nectarifère scindé en quatre, de 4 mm de diamètre, entouré par une fine couronne de poils. Placenta axial, étroit, de 6 × 1,5 mm, non fendu, portant latéralement environ 65 ovules, longs de 0,6 mm, imbriqués, à orientation acropète, disposés sur 2 rangées par bras placentaire.

Fruit capsulaire, brun-gris à maturité, turbiné, lise et verruqueux, de 16 × 7 mm, bractées et bractéoles caduques, lobes calicinaux persistants. Graines mûres aplaties, ovales, de 2,1 × 1,6 mm, alvéolées avec des cavités décroissant en diamètre du centre vers la périphérie.

Figures

FIG. 2. — Thiollierea papineaui Barrabé & Fleurot, sp. nov.: A, vue générale d’un rameau fertile avec des fleurs épanouies; B, face supérieure d’une feuille; C, vue de dessus du calice et du disque nectarifère; D, détail du fruit presque mûr, dont les tissus ne se sont pas encore lignifiés; E, vue interne de la corolle, de l’androcée et du gynécée (sauf l’ovaire); F, vue latérale de la partie basale interne de l’androcée; G, détail du stigmate; H, rameau fertile avec insertion des feuilles,stipules et fleurs nouées; I, coupe transversale de l’ovaire; J, face dorsale du placenta; K, vue latérale de la graine.Échelles: A,2 cm; B, C, E, H, 1 cm; D, F, 5 mm; G, 2 mm; I, J, K, 1 mm. Dessins de Laurence Ramon.

FIG. 4. — Thiollierea naounarum Fleurot & Barrabé, sp. nov.: A, vue générale d’un rameau fertile avec des fleurs épanouies; B, détail du fruit mûr; C, vue de dessus du calice et du disque nectarifère; D, vue interne de la corolle, de l’androcée et du gynécée (sauf l’ovaire); E, détail du stigmate; F, détail d’une inflores- cence et d’une fleur mature; G, coupe transversale de l’ovaire; H, face dorsale du placenta; I, vue latérale de la graine. Échelles: A, D, F, 1 cm; B, C, 0,5 cm; E, G, H, I, 1 mm. Dessins de Laurence Ramon.

FIG. 5. — Thiollierea naounarum Fleurot & Barrabé, sp. nov.: A, habitat et vue générale; B, écorce; C, rameau fleuri; D, bouton; E, F, variabilité de la couleur de la corolle (vues internes); G, H, vues de dessus de l’hypanthe, du calice et du disque nectarifère dans une fleur nouée (G) et dans un fruit (H); I, fruit immature; J, fruit mature sec. Photos de Dominique Fleurot.